Au XIIe siècle, le troubadour Jaufré Rudel, lassé de sa vie de plaisirs, s’embarque pour l’Orient. Ne lui a-t-on pas dit qu’à Tripoli vit la femme qui incarne son idéal d’un amour pur? Hélas, Jaufré, frappé par la maladie, n’arrivera que pour mourir dans les bras de celle qui, avertie de son entreprise, a senti toute la beauté de cet amour de loin…De cette magnifique légende d’amour et de mort, où l’Occident chrétien et l’orient mystique mêlent leurs rêves, Amin Maalouf, le romancier du Rocher de Tanios, prix Goncourt 1993, donne ici une nouvelle variation, dans une langue lyrique aux résonances toutes modernes. Composé par Kaija Saariaho sur le livre de Maalouf, l’opéra L’Amour de loin a été crée à Salzbourg en août 2000 dans une mise en scène de Petter Sellars, sous la direction musicale de Kent Nagano, et dans un décor de George Tsypin.
» CLÉMENCE: — Ce pays est à moi? Peut-être. Mais moi, je ne suis pas à lui. J’ai les pieds dans les herbes d’ici, mais toutes mes pensées gambadent dans des herbes lointaines. Nous rêvons d’outre-mer l’un et l’autre, mais votre outre-mer est ici, Pèlerin, et le mien est là-bas. Mon outre-mer à moi est du coté de Toulouse où résonnent toujours les appels de ma mère et mes rires d’enfant. Je me souviens encore d’avoir couru pieds nus dans un chemin de pierre à la poursuite d’un chat. Le chat était jeune, il est peut-être encore en vie, et se souvient de moi. Non, il doit être mort, ou bien il m’a oubliée, comme m’ont oubliée les pierres du chemin. Je me souviens encore de mon enfance mais rien dans le monde de mon enfance ne se souvient de moi. Le pays où je suis née respire encore en moi, mais pour lui je suis morte. Que je serais heureuse si un seul muret, si un seul arbre, se rappelait de moi. »
« CLÉMENCE: — Si ce troubadour me connaissait, m’aurait-il chantée avec tant de ferveur? M’aurait-il chantée s’il avait pu sonder mon âme? Belle sans arrogance de la beauté, lui a-t-on dit…Belle? Mais regardant sans cesse autour de moi pour m’assurer qu’aucune autre femme n’est plus belle! Noble sans l’arrogance de la noblesse? Mais je convoite à la fois les terres d’Occident et les terres d’Orient, comme si la Providence avait une dette envers moi! Pieuse sans arrogance de la piété? Mais je me pavane dans mes plus beaux vêtements sur le chemin de la messe, puis je m’agenouille dans l’église, l’esprit vie! Troubadour, je ne suis belle que dans le miroir de tes mots. »
« JAUFRÉ: — Je devrais être l’homme le plus heureux au monde, et je suis le plus désespéré… Je devrais avoir hâte d’atteindre sa ville de Tripoli et je me surprends à supplier le Ciel qu’il n’y ait plus dans nos voiles le moindre souffle de vent. Si, à cet instant, un génie sortait des flots pour me dire « Ordonne, Jaufré, et ton vœu sera exaucé! », je ne saurais quoi souhaiter. Ai-je envie de voir devant moi la femme sans tache, et qu’elle me voie devant elle? Aurai-je envie de chanter l’amour de loin quand mes yeux la contempleront de près et que je guetterai chacun de ses plissements de lèvres, chacun de ses soupirs? Jamais je n’aurais dû m’embarquer pour cette traversée. De loin, le soleil est lumière du ciel mais de près il est feu de l’enfer! J’aurais dû me laisser bercer longtemps longtemps pas sa clarté lointaine au lieu de venir me bruler! J’étais l’Adam et l’éloignement était mon paradis terrestre. Pourquoi fallait-il que je marche vers l’arbre? Pourquoi fallait-il que je tende la main vers le fruit? Pourquoi fallait-il que je m’approche de l’étoile incandescente? »
L’Amour De Loin [9782246603016] – 130,00Dhs : LivreMoi.ma, Votre Librairie au Maroc.
[…] le monde. L’auteur, piqué au jeu de son enquête, se plait alors à revisiter les secrets, les amours et les légendes de sa […]
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[…] nos mains ballantes se frôlaient à peine. En cet instant-là, je ne me disais pas « je l’aime« . Ni à moi, ni à elle. Ce que je vais dire peut paraitre risible venant d’un […]
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[…] L’amour de loin, 2001. […]
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