Prisonnier des nazis, Monsieur B., en dérobant un manuel d’échecs, a pu, à travers ce qui est devenu littéralement une folle passion, découvrir le moyen d’échapper à ses bourreaux. Libéré, il se retrouve plus tard sur un bateau où il est amené a discuter une ultime partie contre le champion Czentovic. Une partie à la fois envoûtante et dérisoire. Quand ce texte paraît à Stockholm en 1943, Stefan Zweig, désespéré par la montée et les victoires du nazisme, s’est donné la mort l’année précédente au Brésil, en compagnie de sa femme. La catastrophe des années quarante lui apparaissait comme la négation de tout son travail d’homme et d’écrivain. Le joueur d’échecs est une confession à peine déguisée de cette désespérance.
« Jour et nuit, les yeux, les oreilles, tous les sens ne trouvaient pas le moindre aliment, on restait seul, désespérément seul en face de soi-même, avec son corps et quatre ou cinq objets muets : la table, le lit, la fenêtre, la cuvette, on vivait comme le plongeur sous sa cloche de verre, dans ce noir océan de silence, mais un plongeur qui pressent déjà que la corde qui le reliait au monde s’est rompue et qu’on on ne le remontera jamais de ces profondeurs muettes. On n’avait rien à faire, rien à entendre, rien à voir, autour de soi régnait le néant vertigineux, un vide sans dimensions dans l’espace et dans le temps. On allait et venait dans sa chambre, avec des pensées qui vous trottaient et vous venaient dans la tête, sans trêve, suivant le même mouvement. Mais, si dépourvues de matière qu’elles paraissent, les pensées aussi ont besoin d’un point d’appui, faute de quoi elles se mettent à tourner sur elles-mêmes dans une ronde folle. Elles ne supportent pas le néant, elles non plus. On attendait quelque chose du matin au soir, mais il n’arrivait rien. À attendre, attendre, attendre, les pensées tournait, tournaient, tournaient dans votre tête, jusqu’à ce que les tempes vous fassent mal. Il n’arrivait toujours rien. On restait seul. Seul. Seul. »
« Une chambre particulière dans un hôtel -peut-on rêver traitement plus humain, n’est ce pas ! Et pourtant, croyez-moi, c’était pour nous appliquez une méthode plus raffinée, mais non pas plus humaine, qu’on nous logeait en « personnalités importante » dans des chambres d’hôtel particulières et convenablement chauffées, plutôt que dans des baraques glacées et avec vingt personnes. Car la pression qu’on voulait exercer sur nous pour nous arracher les renseignements recherchés était d’une espèce plus subtile que celle des coups de bâton et des tortures corporelles : C’était l’isolement le plus raffiné qui se puisse imaginer. On ne nous disait rien- on nous laissait seulement en face du néant, car il est notoire qu’aucune chose au monde n’oppresse d’avantage l’âme humaine. Et créant autour de chacun de nous un vide complet, en nous confiant dans une chambre hermétiquement fermée au monde extérieur, on usait d’un moyen de pression qui devait nous desserrer les lèvres, de l’intérieur, plus sûrement que les coups et le froid. »
« Les monomaniaques de tout poil, les gens qui sont possédés par une seule idée m’ont toujours spécialement intrigué, car plus un esprit se limite, plus il touche par ailleurs à l’infini. Ces gens-là qui vivent solitaires en apparence, construisent avec leurs matériaux particuliers et à la manière des termites, des mondes en raccourci d’un caractère tout à fait remarquable. »
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[…] il nous fait prendre la glace pour une lumière endurcie, un jour pétrifié, un solide néant, ou quelque monstre épouvantable, dont le corps n’est qu’un œil. La Seine, au commencement […]
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[…] évoqué mes espoirs d’alors, qui ont tous été déçus. J’ai mes responsabilités dans l’échec de ce qu’on pourrait appeler ma mission paternelle, que je nomme plus simplement amitié. Ma […]
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[…] que ce soit à travers les paroles (parfois autobiographiques comme dans le cas de Barbara, souvent sentimentales, voire impudiques, comme dans le cas de la grande Edith Piaf) ou à travers […]
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[…] ma solitude m’est sensible quand le désert n’a point de repas à m’offrir. Que ferais-je du […]
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[…] père, pourvu qu’il trouve quelqu’un de sûr. Ses naïfs élans butent contre l’indifférence des grandes personnes: il ne rencontre que la déception, source d’une première amertume. […]
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[…] ces chaumières, Vains objets dont pour moi le charme est envolé ? Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères, Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé […]
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[…] qu’elle est ou telle qu’elle sera si un petit changement légal intervient. Reclus, seul dans la société qui l’a maudit, Jean Genet a des attaches. Ailleurs, dans d’autres […]
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[…] « Être seul est devenu une maladie honteuse. Pourquoi tout le monde fuit-il la solitude ? Parce qu’elle oblige à penser. De nos jours, Descartes n’écrirait plus : « Je pense donc je suis. » Il dirait : » Je suis seul donc je pense. » Personne ne veut la solitude, car elle laisse trop de temps pour réfléchir. Or plus on pense, plus on est intelligent, donc plus on est triste. Seule bonne nouvelle : le malheur fait maigrir. Personne ne mentionne ce régime-là, qui est pourtant le plus efficace de tous. La Dépression Amincissante. Vous pesez quelques kilos de trop ? Divorcez, tombez amoureux de quelqu’un qui ne vous aime pas, vivez seul et ressassez votre tristesse à longueur de journée. Votre surcharge pondérale aura tôt fait de disparaître comme neige au soleil. Vous retrouverez un corps svelte, dont vous pourrez profiter – si vous en réchappez » […]
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[…] les guerres faisaient certes des victimes, à un degré bien moindre cependant que la tension, l’ennuie, les maladies congénitales la solitude et le […]
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[…] N’écoute même pas, attends seulement. N’attends même pas, sois absolument silencieux et seul. Le monde viendra s’offrir à toi pour que tu le démasques, il ne peut faire autrement, […]
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[…] provient du rien, le rien qui s’est installé dans ma vie comment à ronger mes membres. Le vide creuse mon corps. J’ai mal. Je ne me plains pas; ce n’est pas dans mes habitudes, mais […]
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[…] « Aujourd’hui, je n’ai que des nouvelles sinistres et déprimantes à te donner. Nos nombreux amis juifs sont emmenés par groupes entiers. La Gestapo ne prend vraiment pas de gants avec ces gens, on les transporte à Westerbork, le grand camp pour juifs en Drenthe, dans des wagons à bestiaux. Miep nous a parlé de quelqu’un qui s’est échappé de westerbork. Westerbok doit être épouvantable. On ne donne presque rien à manger aux gens, et encore moins à boire, car ils n’ont de l’eau qu’une heure par jour et un WC et un lavabo pour plusieurs milliers de personnes. Ils dorment tous ensemble, hommes, femmes et enfants ; les femmes et les enfants ont souvent la tête rasée. Il est presque impossible de fuir, les gens du camp sont tous marqués par leurs têtes rasées et pour beaucoup aussi par leur physique juif. S’il se passe déjà des choses aussi affreuses en hollande, qu’est-ce qui les attend dans les régions lointaines et barbares où on les envoie ? Nous supposons que la plupart se font massacrer. La radio anglaise parle d’asphyxie par les gaz ; c’est peut-être la méthode d’élimination la plus rapide. Je suis complètement bouleversée. Miep raconte toutes ces horreurs de façon si poignante, elle est elle-même très agitée. L’autre jour, par exemple, une vieille femme juive paralysée était assise devant sa porte, elle attendait la Gestapo qui était allée chercher une voiture pour la transporter. La pauvre vieille était terrifiée par le bruit des tirs qui visaient les avions anglais et les éclairs aveuglants des projecteurs. Pourtant Miep n’a pas osé la faire entrer, personne ne l’aurait fait. Ces messieurs les Allemands ne sont pas avares de punitions. » […]
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[…] je m’étais plu à jouer avec les images de l’avenir. Souvent j’avais rêvé de rôles qui devaient m’être assignés, […]
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